Toise
Toise (unité)
Ne pas confondre avec l’instrument de mesure.
La toise est une unité de longueur ancienne qui correspond toujours à six pieds français1,2, soit deux verges ou une aune et demie, soit 1,949 m.
Le toisé est un relevé de quantité « à l’aune de » la toise (l’équivalent du métré qui se réalise à l’aune du mètre). Le toiseur et le toiseur-vérificateur réalisent le toisé et la vérification de celui-ci.
Étymologie
Le mot « toise », du latin tendere, en français « tendre », signifie « l’étendue des bras », c’est-à-dire l’envergure des bras. Elle a donc comme base la distance entre les bouts des doigts, les deux bras étendus.
Unité de longueur
La toise est une unité de mesure connue depuis la plus haute Antiquité. Dans la Grèce antique elle s’appelait « orguia ». Il y a toujours exactement six pieds dans une toise. Pour un pied « normal » de 30 cm environ, cela donne une longueur approximative de 1,80 m. Cela correspond donc à la fois à la distance entre les deux bras étendus et aussi à la taille humaine. Au Canada français, son symbole officiel est T.
En France uniquement — puisque le « pied du roi de France » était particulièrement grand à comparer avec les mesures équivalentes partout ailleurs — la toise s’était spécialisée pour mesurer la taille humaine (« Passer sous la toise »), car presque personne ne mesurait plus de six pieds-de-roi. Pour désigner la signification traditionnelle de « l’étendue des bras », on créa en France une autre « toise » que l’on appela brasse, mesurant cinq pieds-de-roi. Par ailleurs à l’époque romaine, la mesure de cinq pieds est attribuée au pas (de deux enjambées). En France, la brasse est également utilisée pour rendre la « toise marine » (fathom en anglais, Faden en allemand), bien qu’en anglais et en allemand, cette dernière mesure soit de six pieds également.
Comme dans beaucoup d’autres pays, la toise fut employée en France dans la définition légale des unités de longueur. Historiquement trois toises de longueurs différentes eurent cours légal en France.
Histoire de la toise de Paris
Depuis le Moyen Âge l’étalon de la toise de Paris fut matérialisé par une barre de fer fixée dans le mur du Grand Châtelet et portant deux ergots. Son existence est attestée dès 13943, mais en fait, il est sûrement bien plus ancien. À une date « peu antérieure à 1667, cet étalon s’était trouvé faussé par un fléchissement du pilier sur lequel il était scellé. »4 Colbert, en sa fonction de Surintendant des Bâtiments, Arts et Manufactures décida alors de rétablir l’étalon de la toise de Paris. Les conditions exactes de cet établissement ne sont pas documentées, mais dès 1667, les artisans, notamment la corporation des maçons s’aperçurent que le nouvel étalon différait sensiblement de leurs instruments de mesure habituelle. À comparer avec leur propre étalon « la toise de l’Écritoire » — jusqu’alors supposé être la copie conforme de la toise (ancienne) du Châtelet — ils constatèrent une différence de près de 0,5 % plus court pour le nouvel étalon.
Pour toute économie, dès l’Antiquité, la précision et l’invariabilité des poids et mesures était d’une importance centrale. Une différence d’environ 0,5 % de l’étalon légal revenait assurément à un changement de mesure de référence. Face aux multiples plaintes et malgré une démonstration établissant clairement une différence notable entre la mesure ancienne et la nouvelle mesure, Colbert décida de ne pas se déjuger et, en 1668, il ordonna aux maçons de s’aligner sur le nouvel étalon de la toise du Châtelet.
Depuis, on désigne habituellement la toise ancienne de Paris par le terme « toise de l’Écritoire ».La légende prétend que c’était la taille de Philippe le Bel.
Toise de l’Écritoire
Le pied de la toise ancienne était connu et attesté depuis l’Antiquité. Il est d’une parenté très proche avec le pied romain. Dans la littérature, il est appelé « pied dorien pheidonique ». Le préhistorien allemand Herrmann Büsing lui attribua 326,528 9 mm5. Compte tenu du fait établi que les mesures anciennes, dès l’Antiquité, entre elles, entretiennent presque toujours des rapports sept-lisses, rarement des rapports onze-lisses et jamais de rapports impliquant un nombre primaire supérieur à onze, on peut légitimement préférer une valeur arbitraire, elle-même sept-lisse : 326 592 µm. Cela dit, cette valeur conventionnelle se situe à peine 0,02 % au-dessus de la valeur confirmée par Büsing et n’est guère que de 0,0012 % en dessous de la valeur préférée par Guilhiermoz. Il s’agit là uniquement d’une manière pratique d’arrondi des valeurs de mesures anciennes, sachant que — comme cela a été déjà dit plus haut — la variation réelle des mesures anciennes atteignait souvent aux alentours de ± 0,1 %.
Partant de la coudée de Nippur — dont l’usage est attesté en Mésopotamie depuis la fin du VIe millénaire av. J.-C. — les Égyptiens anciens trouvèrent le doigt appelé plus tard romain, par une division simple de vingt-huit de cette coudée ancienne. La nouvelle mesure qui en résulte est attestée dès le début IIIe millénaire en Égypte et fut adoptée, plus de deux mille ans plus tard, par les Romains comme étant la leur.
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Ensuite, les géomètres égyptiens introduisirent le facteur onze afin de pouvoir profiter d’une très bonne approximation trigonométrique de leur remen de construction, leur demi-carré gradué. Ainsi fut créée la « coudée royale ancienne », utilisée en Égypte jusqu’à la IVe dynastie. La sixième part de la canne de Toulouse, déjà cité plus haut, est identique au pied royal ancien d’Égypte. Selon Guilhiermoz, la première mesure est de 132,7 lignes de Paris, approximativement 299,349 mm. Tandis que le second mesura, selon le spécialiste allemand Rottländer, (16 × 523,62 / 28 =) 299,211 mm6. La différence entre ces deux valeurs, de quelque 0,0458 % seulement, est insignifiante dans le contexte des mesures anciennes. Ces deux mesures doivent donc être considérées comme étant identiques.
Depuis la IVe dynastie les Égyptiens affectèrent vingt doigts de leur pied ancien — au lieu de, auparavant, vingt doigts romains — aux deux cathètes de leur demi-carré de construction. L’hypoténuse fut leur nouvelle coudée royale mesurant en conséquence 529,2 mm. Leur pied mesura donc 302,4 mm. Le pied dorien entretient avec ce dernier le ratio bien connu en métrologie de 27 : 25.
Au Moyen Âge, ce pied dorien fut adopté par les Francs comme le leur. Il fut ensuite préservé en France jusqu’en 1668. Concrètement, le pied fut sûrement légué par intermédiaire du pied attique-solonique, une mesure très répandue en Méditerranée, y compris en Italie, dès l’Antiquité et pendant le Moyen Âge. Son ratio à l’ancien pied français est de 9 : 10. Le rapport entre les mesures doriennes, donc les françaises d’avant 1668 et les mesures assyriennes ou anglaises est de 14 : 15. Le ratio de la toise ancienne française et de la verge espagnole est de 35 : 16.