Art Rupestre
Art rupestre
L’expression « art rupestre » (du latin rupes, « roche ») désigne l’ensemble des œuvres d’art au sens large (sans appréciation esthétique) réalisées par l’Homme sur des rochers, le plus souvent en plein air. La plupart des auteurs l’opposent aujourd’hui à l’art pariétal (du latin parietalis, « relatif aux murs », art sur parois de grottes en intérieur), mais aussi à l’art mobilier (que l’on peut déplacer) et à l’art sur bloc1. Cette forme d’art occupe une part majeure dans l’art préhistorique. Sa pratique est restée continue jusqu’à nos jours ; elle n’est pas le fruit d’une ethnie ou d’une culture particulière, mais relativement universelle.
Selon le préhistorien Emmanuel Anati, il existerait 45 millions de peintures rupestres sur des rochers et dans des grottes, sur 170 000 sites de 160 pays2.
Techniques
L’art rupestre est caractérisé par l’utilisation de plusieurs techniques :
- la gravure (piquetage et incision) : les artistes martelaient un support rocheux avec une pierre dure. Cette technique était très répandue. Dans ce cas, on parle de pétroglyphe.
- la peinture : les poudres de couleur utilisées étaient des minéraux broyés. Grâce à un roseau ou un os creux, ils soufflaient les poudres de couleur pour représenter les crinières, les poils, les pelages d’animaux.
Sujets
Les sujets sont divers selon les périodes et les régions : essentiellement des représentations animales au Paléolithique supérieur (celles de Bornéo, notamment, datent d’au moins 40 000 ans3) puis, à partir du Néolithique des humains, des représentations humaines de grandes tailles les bras levés, des orants, des armes primitives, des chars, des habitations, des arbres. Les représentations de scènes sont extrêmement rares au Paléolithique, plus fréquentes à partir du Néolithique (scènes de chasse, de guerre ou de pastoralisme).
Fin 2019, l’Université de Griffith (Australie) publie4 les résultats d’une datation à l’uranium-thorium sur une peinture préhistorique représentant une scène de chasse découverte en 2017 dans une grotte sur le site de Leang Bulu Sipong sur l’île des Célèbes (Indonésie), selon laquelle cette peinture serait vieille d’au moins 43 900 ans, ce qui en ferait la plus ancienne œuvre d’art figuratif connue5,6. Les peintures mettent en scène des bovidés et des cochons sauvages affrontés par des chasseurs munis de lances et de cordes. Les chasseurs sont des humains mais présentent des traits animaux (queue, bec, etc.) : ce sont des thérianthropes.
L’étude des motifs met en évidence une organisation spatiale et un programme iconographique ou décoratif.
Répartition géographique
Parmi les sites les plus renommés :
Afrique
- En Afrique du Nord, notamment
- au Maroc dans les régions d’Aït Ouazik7, du Haut Atlas8, de Figuig et d’Ich9, du Hank10, de Msied11,
- en Algérie dans les régions d’Aflou, Tiaret, Ain Sefra, El-Bayadh en Oranie12, à Bou-Saada, Djelfa, le Constantinois, Taghit, Tassili, Tadrart Rouge, Djanet,
- en Tunisie dans les régions de l’Ousselat13, Tameghza14 et Ghomrassen15,16,
- en Libye dans les régions de Tadrart Akakus17 et du Messak18 dans le Fezzan19,
- en Égypte à Gilf el-Kébir20, Qurta21,22, Djebel Uweinat23,
- aux Canaries à Gran Canaria, La Palma, La Gomera, Lanzarote, El Hierro, Fuerteventura et Tenerife24,25.
- Au Sahara, qui comporte de nombreux sites de peintures rupestres, comme dans la Tassili, le sud des monts Atlas, dans le Tibesti, etc.
- En Afrique de l’Est :
- En Somalie, le site de Laas Geel, daté de 9000 à 3000 av. J.-C., découvert en 200226, présente certainement les peintures rupestres les mieux préservées du continent africain[réf. nécessaire]. De nombreux sites sont aussi présents dans la Corne de l’Afrique, comme en Érythrée (Qohaito (en)) et en Éthiopie (Kundudo), particulièrement dans la région du Tigré.
- En Somalie, le site de Dhambalin, daté de 9000 à 3000 av. J.-C., découvert en 2007.
- Au Soudan, le site de Geddi-Sabu.
- À Djibouti, les sites d’Abourma, Dorra et Balho27,28.
- En Afrique australe :
- En Namibie, de nombreux sites d’art rupestre, dont le fresque de la Dame blanche, sur le massif du Brandberg situé dans le Nord-Ouest du désert du Namib29.
- En Namibie, la grotte Apollo 11 qui date de 26 000 ans, la grotte Wonderwerk et l’abri de Game Pass dans les monts du Drakensberg.
- En Ouganda, le site de Nyero26.
- En Afrique du Sud, le parc du Drakensberg30.
- Au Botswana, le site de Tsodilo31.
- En Zambie, les peintures de Mwela (en)32
Asie
- En Inde (à partir de 26000 av. J.-C.) : le sous-continent indien a le troisième plus grand nombre de sites d’art rupestre après l’Australie et l’Afrique, plus que 150 sites situés un peu partout mais surtout dans le centre, à Madhya Pradesh (Bhimbetka) et Chhattisgarh (Jogimara).
- Arménie : à Voskehat et sur l’Oughtasar.
- En Indonésie :
- la grotte de Lubang Jeriji Saléh, sur l’île de Bornéo, porte des peintures datant d’au moins 40 000 ans. Elles représentent notamment un gros animal dans des tons rouge orangé33,3.
- des grottes des Célèbes abritent des peintures dont certaines ont aussi été datées de 40 000 ans34,35 (notamment les grottes de Maros-Pangkep35) et même de 43 900 ans (grotte de Sipong 4), ce qui fait de ces dernières peintures les plus anciennes œuvres d’art figuratifconnues4 ;
- des peintures rupestres du Mésolithique, datant d’entre −9000 et −500036, représentent des personnages utilisant des cerfs-volants.
- En Chine:
- à Damaidi, dans la région autonome Hui du Ningxia, des peintures rupestres dateraient du Paléolithique (-20 000 à -30 000) ; parmi celles-ci, une figuration féminine serait proche de certaines Vénus paléolithiques de Grèce ou d’Australie37.
- Paysage culturel de l’art rupestre de Zuojiang Huashan, classé patrimoine mondiale de l’UNESCO
- Kazakhstan: Tamgaly, Tamgaly-Tas et Kulzhabasy, près d’Almaty et dans la vallée de l’Usek, à proximité de Jarkent
- Kirghizistan : essentiellement dans les montagnes du Tien Shan, comme à Tcholponata, dans la vallée Talas, à Saimaluu-Tash, et sur l’effleurement rocheux appelé trône de Souleman à Och dans la vallée de Fergana.
- Iran : Art du relief rupestre dans l’Antiquité iranienne.
Europe
Les sites ayant livré des œuvres d’art rupestre datant du Paléolithique supérieur sont rares :
- La Vallée du Côa au Portugal.
- Les sites d’art rupestre du bassin méditerranéen de la péninsule Ibérique datent du Néolithique et des âges des métaux.
- Il convient également de mentionner le rocher gravé de Fornols à Campôme (Pyrénées-Orientales) qui a livré des gravures rupestres probablement magdaléniennes38.
- Des abris paléolithiques sculptés à la lumière du jour (Cap Blanc, Roc-aux-Sorciers) ou ayant fourni des blocs gravés et peints (environs des Eyzies-de-Tayac) sont également connus.
- De nombreuses gravures rupestres sont connues également dans les Alpes, dont les 30 000 gravures de la vallée des Merveilles dans le Mercantour en France (âge du bronze) et celles de la Valcamonica en Italie (surtout âge du cuivre, âge du bronze et âge du fer). En Haute-Maurienne (Savoie), les flancs nord et sud du Grand roc Noir sont pourvus des gravures rupestres du Grand roc Noir, qui représentent des chevaliers en armes, non loin des cerfs gravés sur le Rocher du Château.
- Les gravures rupestres de Norvège et de Suède
Océanie
Amérique du Nord
Amérique du Sud
- La Cueva de las Manos est un site archéologique et de peintures rupestres qui se trouve en Argentine, en Patagonie, à proximité du Río Pinturas. Les œuvres les plus anciennes datent approximativement de -13000.
Bibliographie
- Valérie Feruglio, « Les empreintes de mains dans l’art rupestre », in Yannick Beaubatie (dir.), Empreintes, Tulle, Mille Sources, 2004, p. 161-170
- Luc Hermann, Les pétroglyphes de l’Oughtasar et de Voskehat en Arménie, Paris, 2011
- Luc Hermann, Les pétroglyphes de Tcholpon-Ata au Kirghizstan, Paris, 2010
- Luc Hermann et Boris Zheleznyakov, The petroglyphs of Kulzhabasy in Kazakhstan, Paris, 2012
- Jean Clottes, Le musée des roches, Paris, 200