
Deux visages qui n’en font qu’un(Temps de lecture estimé : 8 minutes)
Q Grâce àla fine observation de notre ami Jérôme Ramond, qui découvrit ce pétroglyphe sur les murs de l’église de Balacet, nous pouvons rendre compte de sa belle et surprenante découverte. Quand la sculpture rencontre l’anthropomorphisme, leur union ne peut nous laisser de marbre. De tout temps, elle inspira les hommes – au sein d’espèce humaine – et aura rempli l’espace sacré des sanctuaires polythéistes à ciel ouverts et en espaces clos et par la suite monothéistes chrétiens, de représentations mémorables et mémorisables par les croyants et pratiquants de religions orthodoxes ou hétérodoxes, comme elles purent être perçues dans l’antiquité.
Les sculptures, qu’elles fussent réalisées à l’aide de piquetés linéaires comme on les admire encore de nos jours au mont Bégo en France ou au Valcamonica en Italie ou ultérieurement dans l’occident chrétien, s’apparentent à l’orthopraxie, en cela qu’elles nécessitent un geste juste et inspiré. Inspiré par la foi ou une croyance qui projette le sculpteur et le futur contemplateur dans un temps mythique et / ou cosmogonique.
Ci-dessous, écoutez la version audio de l’article :
MODÉLISATION 3D : Premier visage

Lien modélisation 3D direct ici : https://p3d.in/k9El4
En manipulant la modélisation à l’aide de votre souris ou votre trackpad, vous remarquerez que le réalisme de cette sculpture sur bloc pousse le détail jusqu’à avoir creusé les narines, ce qui reste en règle générale, l’apanage de la sculpture en ronde-bosse.
En retournant la représentation 3D afin de révéler l’envers du visage, vous pourrez quantifier la forme des narines et des globes oculaires. On voit que ces dernières ne sont pas des cupules autour des quelles se serait organisé les autres traits du visage. Pour cela, poussez à fond la luminosité de votre ordinateur.
Le front est protubérant sans excès. Si le menton est émacié, il fut mis en relief sans pour cela être proéminent.
MODÉLISATION 3D : Second visage

Lien modélisation 3D direct ici : https://p3d.in/RTbiQ
Ce second visage fut lui aussi sculpté dans le même grés rose de Bordes / Lez que le premier ci-dessus et fait 12cm de haut sur 6 de large.
Cette figure moins grossière n’est visiblement pas la répétition du premier ci-dessus et correspond mieux à la représentation que l’on se fait du Christ en occident, sous des traits caucasiens avec barbe et moustache. Les traits généraux tirés vers le bas, semblent montrer un visage en souffrance et pourrait-être un instantané de la Passion du Christ ou de tout autre supplicié ; la bouche grande ouverte le confirme. C’est un masque au sens propre et figuré, qui donne toute sa théâtralité à ce « calvaire » de cet homme. De plus, les yeux furent sculptés en forme de larmes qui prolongent les canaux lacrymaux.
Quand au nez aplati, il donne l’impression d’avoir été cassé pour ne pas dire écrasé, ce qui reste en lien avec la Passion du Christ, à la différence de la première sculpture. Ce scénario paraît en tout cas raisonnablement crédible. Ce visage émacié, voire tuméfié, semble comme rentré dans la pierre, tant il est écrasé par douleur. Ceci est particulièrement visible lorsque l’on met la modélisation 3D de biais ; rien ne dépasse. À la différence des peintures et des Christ en croix qui donnent de Jésus un portrait presque apaisé, cette sculpture toute en gravité donne toute la mesure de la gravité de l’instant et de la mort qui frappe.
A contrario, nous pourrions très bien voir dans ce faciès, un homme âgé, tel Joseph le mari de la Vierge Marie et père nourricier de l’Enfant Jésus ; ou bien à l’opposé, représenter une personne âgée sans rapport direct ou indirect avec Jésus mais toutefois en lien avec le Nouveau Testament ou l’Ancien Testament s’il s’agissait de Noé, qui fut lui aussi charpentier en construisant de ses mains « l’Arche » éponyme. D’ailleurs par le passé, les églises furent souvent comparées à des « vaisseaux de pierres », accueillants les fidèles réfugiés en son sein car régies par le droit d’asile, comme l’Arche de Noé avait recueillie les paires d’animaux qui repeupleraient « le nouveau monde ».
Rappelons que Joseph – Yosef en hébreu -, fut charpentier, ce qui n’est pas forcément en lien avec cette profession mais voulant souligner le caractère de « l’homme sage » que confère la vieillesse.
La croix et la bannière

Lien de modélisation 3D de la croix ici : https://p3d.in/VO4oP
La mise en relief des croix qui bardent l’église de Balacet dédiée à Saint-Lizier, nous apparaissent en trompe-l’œil, donnant l’impression d’un relief convexe, alors qu’il est le résultat d’un creusement concave. L’une d’entre elle ressemble à une croix gammée cf ci-dessous. Est-ce le résultat d’un sympathisant du régime nazie pendant la seconde guerre mondiale ou bien remonte-t-elle des siècles avant, quand on sait que ce symbole était déjà présent au paléolithique supérieur.

Les cupules : marqueurs religieux chrétiens

Déjà au néolithique ainsi que pendant la protohistoire, à savoir, les âges du bronze et du fer, les cupules furent adossées au funéraire ; à savoir aux sépultures sous-roches et au mégalithisme en général : dolmens, menhirs. Cette pratique se perpétuera jusqu’au moyen-âge, sur nombre d’églises dans toute la chrétienté. 16 cupules constellent un bloc de l’église de Balacet, un second l’est d’ailleurs tout autant.
Malgré la main mise de l’église catholique sur les esprits, elle ne put jamais accaparer les cœurs des paysans – païens – qui continueront à creuser des cupules sur les murs des édifices religieux.
Doit-on pour autant se livrer à l’ethnologie comparée, en présumant que ces pratiques étaient au néolithique et à la protohistoire destinées à des divinités, dont ont eu voulu s’approprier la force, la guérison ou la bienveillance comme ce fut le cas lors du moyen-âge ? L’exercice semble délicat, voire hasardeux, bien qu’il ne soit pas déraisonnable de le penser, en ne perdant jamais de vue que : comparaison n’est pas raison.
Où sont donc ces représentations ?
Non pas sur quelques blocs erratiques en granit de la vallée du Riberot mais sur les murs de l’église de Balacet. Nous vous laissons la curiosité et la patience de découvrir leurs emplacements. Ouvrez l’œil et le bon. Car il faut se pencher sur le sujet pour l’apercevoir…
- Auteurs : Claude Moune, Jérôme Ramond & Vivien Laïlle.
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