
Un fossé quadrangulaire non loin de la chapelle de l’Isard.(Temps de lecture estimé : 7 minutes)
Il vous est peut être arrivé de promener le zoom de Google Earth ou de ses petits frères sur la vallée du Biros ? Non loin de la chapelle de l’Isard, au lieu dit « Pla de la Peyre » sur la carte IGN, vous aurez sans doute remarqué une figure énigmatique en forme de carré, orientée N/S. C’est de cette étrangeté dont nous allons développer quelques hypothèses, dans les lignes qui suivent.
. CADRE GEOGRAPHIQUE
. Situé en région Occitanie, dans le Haut-Couserans, sur la commune d’Antras (cadastre : feuille 8, parcelle 2482, section OC). . Le site est implanté dans la vallée de l’Isard à 1420 m d’altitude (42°51’25.91’’N / 0°53’19.02’’E), sur un replat au lieu-dit Pla de la Peyre, (42°51 ‘424.92’’N / 0°53’02.05’’E). Surplombant à l’ouest la cabane forestière de l’ONF (1400m) et à une encablure du ruisseau de l’Isard, non loin de la chapelle éponyme (1322 m) à l’est, intégrée à cette étude.
. Le réseau étudié dans ce rapport est circonscrit entre l’étage montagnard et subalpin.
Carte Ign Top 25, 1947 OT (Aspet)
. Photo N°1
. SITE DU PLA DE LA PEYRE
. Situé en surplomb du ruisseau de l’Isard, sur un replat (photo 1), en épaulement au flanc du
versant nord de « Les Trémailles », il s’intègre dans un double cirque glaciaire qui s’étage entre 2300 m
et 1390 m. Le socle calcaire du Dévonien supérieur, partage le territoire avec du schiste argileux fortement carboné (ordovicien et silurien). L’acidité du sol (ph de 7) laisse présager la non conservation d’ossements.
. Observations visuelles et mesures :
1 / La concentration de blocs sur cette zone est sans équivalent aux alentours tout aussi plat. Seul le bloc erratique, éponyme (photo 1), fut déposé au Pléistocène par le glacier d’Uls (glaciation de Würm). Les alignements de pierres observés lors de la prospection pédestre dans le sens N/S et E/O, ne relèvent pas d’une dispersion aléatoire au sens géomorphologique due aux éboulements consécutifs à l’érosion de la crête surplombante du pic de Paumaude, mais d’une anthropisation ordonnée et orientée (photo 2).
. Photo N°1
. Photo N°2
2 / Contigu à ce chaos, la prospection visuelle confirme la présence d’une anomalie topographique de forme carré, qui à l’examen avec Google Earh, Géoportail et la vue aérienne de 1950 de l’IGN, confirme la présence d’une dépression quadrangulaire de 46 m de large x 51m de long (photo 3).
. L’étude en lumière rasante en début et fin de journée, (août 1969) ainsi qu’en saison hivernale (22 décembre 1974) révèle un relief négatif bordé par son ombre portée ; l’observateur (moi) étant placé à plus de 90° par rapport aux rayons solaires (photo 4).
. La couleur vert foncé de l’herbe en début de croissance (avril/mai). Uniformisée avec la pelouse environnante en fin de croissance (juin), matérialisent le tracé quadrangulaire, caractéristique de la présence d’un fossé et non d’une substruction, qui si elle existe ne peut être qu’en deçà (photo 4).
. Cette forme n’est pas caractéristique des enclos pour bétail en milieu montagnard. Son orientation à un degré prés au nord serait un heureux hasard… La possibilité d’un campement pour les ouvriers qui auraient pus y séjourner, pour la construction ou la reconstruction de la chapelle de l’Isard, après une avalanche ou un incendie, n’aurait pas nécessité le creusement d’un fossé. Au XXe, le chemin d’accès au site n’aurait pas permis le creusement du dit fossé par une machine mécanique : tracteur ou pelleteuse. Cette structure ne peut être que le résultat d’un travail à la main : bêches, pelles et pioches.
. Au vu de ce qui précède, nous penchons pour un camp militaire semi-permanent (vu les hauteurs de neige pour le ravitailler en hiver), ou permanent. 2 des côtés sont en bord de pente, accentuant son caractère défensif. Des sondages permettraient de révéler la présence de poteaux et ainsi confirmer ou infirmer l’hypothèse d’un camp retranché. Poteries et monnaies s’y trouvant permettraient une datation.
1 / L’observation du cliché de l’IGN année1950 (photo 3), montre clairement la trace au sol d’une construction rectangulaire, (20 m x 12m) faisant partie intégrante du fossé carré (en bas, à gauche). Aujourd’hui recouverte de sapins, (voir cliché ci-dessus) ces derniers délimitent à l’identique ses antiques contours. Orienté N / S – E / O ( 359° N), sa forme, ses dimensions et son orientation, non caractéristiques des enclos pour le bétail en milieu montagnard, ne peuvent être attribués à une activité pastorale.
. Une ancienne implantation de la chapelle de l’Isard sur cette zone plane n’est pas à exclure, d’autant que l’actuelle située en aval (1322 m) et reconstruite 3 fois (avérées) à cet endroit, est implantée sur une forte pente (15°), qui nécessita un important nivellement en terrasse, et l’expose aux avalanches. Les dimensions de cette structure rectangle, sont équivalentes (20 m x 7 m) à celles de la chapelle de l’Isard (20 m x 7 m).
. Son orientation N/S ne correspond pas à l’alignement des édifices religieux chrétiens, généralement orientés vers le levant. Toutefois, l’église saint Pierre d’Engomer est orientée au Nord.
. (Un grossissement supérieur nuirait à la définition et à la lisibilité de la carte).
. Cliché IGN 1950 (photo N° 3)
. Photo N°4
Tout savoir sur les camps romains ; voici la référence par celui qui fut un contemporain de leur édification en campagne : « Des fortifications du camp »